I CHOSE THIS PATH Qu'est ce que c'est être belle ? Est-ce qu'on parle de beauté physique comme ces stars parfaites avec un corps parfait, ou de la beauté intérieure comme me le répète en continue mes parents, des martyrs qui sont obligés d'élever une dinde comme fille ? Malheureusement dans les deux cas, que ce soit physique ou mental, je suis au plus bas de l'échelle, peut être même en dessous de certains animaux. Je suis en dessous de l'homme, du chien, de l'insecte, de toute forme vivante sur cette terre et cela je l'ai compris depuis toute petite. « Grosse vache » « laideron » « déchet », j'avais tout eu jusqu'à présent, ces insultes n'étaient plus que des murmures qui avait du mal à traverser mes tympans. Même chez mes parents, malgré la plus grande hypocrisie qui soit, je sentais quand même une pointe d'animosité envers moi avec « Ma grosse boule » « Mon petit cochon ». Mais je peux finalement les comprendre, comment faire face aux autres parents d'élèves, quand vous êtes la mère et le père de « Grosse vache. » Au fil du temps, j'avais réussi à me faire oublier, le laideron était devenu une espèce d'ombre fantomatique, qu'on entraperçoit, qu'on devine. Le jour était une forme d'enfer cyclique à la manière de Dante, une prison où tu tournes en rond, et le soir était synonyme de repos après la bataille, j'aidais ma mère en dépression après que papa soit partit, je faisais le ménage, la cuisine ? Ma tête était occupée pendant quelques instants, je pouvais librement penser à autre chose. C'était un genre de quotidien plat.
Jusqu'au Lycée. Pour la plupart des gens, le lycée change quelque chose en toi, tu deviens plus mature, tu rencontres de nouvelles personnes qui te changent encore plus.
Au bout de quelques jours, on me donna le nom de « Vénus », mes camarades de classes mais aussi les autres, à croire que je n'étais qu'un monstre qu'on s'amusait à énerver gentiment en le piquant avec un bâton. Mais alors que je croyais ce nouveau surnom ironique allait m'enfoncer encore plus bas dans l'échelle humaine, mes bourreaux commencèrent à me parler. Pas en m'insultant, ou en me regardant de travers mais comme une fille normale. Au début ce n'était que des « bonjour » et des « ça va ? » mais de fil en aiguille les discussions devinrent plus animées, plus précises « T'en a pensé quoi de ce film ? », «Qu'est ce que tu fais là toute seule Vénus ? Viens manger avec nous ! » Je commençais même à croire que ce surnom était un compliment.
Un jour, une des filles avec qui j'avais sympathisé m'invita à la plage pendant les vacances d'été. Je déteste la plage, rien que le fait de me dénuder pourrait faire vomir quelques personnes, dont moi. J'aurai donc pu dire non, mais l'espoir d'avoir un semblant de vie sociale me laissa accepter. J'avais acheté un joli maillot, qui laissait entrevoir mes bourrelets, qui serrait ma poitrine et me coupait la respiration, mais il était très joli… Je l'avais mit sous mes vêtements pour ne pas avoir à le mettre une fois à la plage.
Une fois dans sa voiture, elle me servit une cannette de soda déjà ouverte. Alors que je voyais le paysage défiler devant moi, ma vue se brouilla, les arbres devinrent une masse verte floue. Puis le noir complet.
Un de mes yeux s'ouvrit lentement, puis l'autre. Mais c'était toujours le noir le plus total. Je sentis finalement qu'on m'avait mit un bandeau sur les yeux, je voulais bouger mais je me sentais attachée, un peu comme un saucisson, je gigotais pour me défaire de ces liens mais rien n'y faisait. Mais alors que j'avais perdu espoir, j'entendis une porte s'ouvrir et se fermer, puis des rires, beaucoup de rires, beaucoup trop. Des rires stridents de filles , de garçons, à l'oreille ils étaient une quinzaine. Puis un bruit de flash, comme celui d'un appareil photo ou d'un téléphone, puis un autre, et encore un autre. Les rires redoublèrent. Je lâcha un idiot « A l'aide.. » qui se perdit entre les moqueries des individus devant moi. Ces personnes n'étaient pas du tout là pour m'aider. Après quelques minutes, les railleries cessèrent. La porte se rouvrit et se referma.
Je suis restée comme ça deux jours, attachée comme un saucisson avec mon maillot de bain dans un hangar. Apparemment le propriétaire du hangar m'a trouvée comme ça et a appelé une ambulance.
La police a cherché partout la fille avec qui j'étais censée aller à la plage mais elle avait complètement disparue. Quand je rentre enfin chez moi, ma mère m'adresse un faible sourire. Qu'est ce qu'il a fait sourire ? Le fait que je sois en vie ? Où est ce que c'est encore une moquerie comme j'en ai maintenant l'habitude ? Je ne veux pas savoir, je monte dans ma chambre pour pleurer un bon coup. J'entends ma mère s'approcher de ma porte. « Ma chérie ça te dirait d'aller faire un tour en voiture toutes les deux, pour nous changer les idées ? »
Quand j'étais petite, ma mère m'emmenait souvent en voiture avec elle pour se balader. Prise un peu par les sentiments et touchée qu'elle me demande quelque chose d'autre que la vaisselle, j'accepte.
On fait plusieurs fois le tour de la ville. Aucune de nous deux ne parle, et cela vaut peut être mieux. Elle finit par poser sa main sur la mienne et me parle : « Je sais que tu en as marres ma chérie. Moi aussi. » Elle me sourit une dernière fois et avant que je ne puisse rajouter quelque chose elle tourne violemment le volant au moment où une autre voiture passe en contre sens.
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Je suffoque, et me réveille en sursautant. Je me sens toute bizarre, je regarde autour de moi, je suis dans une chambre, mais pas la mienne. Est ce que tout n'était qu'un rêve ? Non j'ai vraiment senti quelque chose me traverser le corps à ce moment là. J'ai vraiment eu mal, je me suis vraiment sentie partir loin.. Partir loin de cette satanée ville de Pittsburgh. Je titube vers le miroir au coin de la pièce, bizarre, mon corps est plus léger..
J'ai un cri de stupeur quand j'arrive devant le miroir. Je touche ce doux visage, ces longs cheveux, cette taille fine. Je me rue ensuite sur le bureau en face. Je ne trouve pas de carte d'identité mais une carte de fidélité chez un un institut de beauté. Un sourire commence à se dessiner sur mes lèvres, puis je commence à éclater de rire, c'est un rire différent, ce n'est pas le mien. Cela me fait encore plus rire. Je reviens devant le miroir, je m'examine de nouveau, mon rire ne peut pas s'arrêter, c'est.. Tellement ironique, tellement beau. Tous ces connards qui m'ont fait du mal vont peut être finir par aller en enfer alors que moi j'ai réussie haha..
Je vais me venger, je vous le promets je vais me venger.